“Argent et biens” : le programme

L’argent et le patrimoine : un épineux partage

Partager les biens, répartir les dépenses des enfants, compenser les déséquilibres des contributions passées, demander réparation… Ce sont globalement les grands sujets d’argent que l’on a à régler dans les séparations et les divorces.

Entre le coût de la procédure, l’augmentation des charges à venir, la découverte de ses droits acquis ou perdus, la division de ce que l’on possède, l’addition est parfois salée. 

Sans compter que tout le monde n’est pas à l’aise avec les papiers, les chiffres et l’argent !

Avant la séparation : un flou artistique

Mon expérience montre qu’il y a majoritairement un seul des deux partenaires ou conjoint qui s’occupe des papiers et des finances. Alors à la séparation, c’est vraiment difficile pour l’autre : non seulement il ne parvient pas à réunir les documents - surtout que tout est désormais dématérialisé avec des mots de pas qu’il ne connaît pas toujours - mais il ignore même souvent la situation financière de la famille.

Quels sont vos revenus ? Combien gagne votre partenaire ? 

Que possédez-vous ? Qui a investi et combien pour le financement des biens ? Qui a remboursé les emprunts ?

Comment avez-vous décidé qui a payé quoi au cours de la vie commune ? Avez-vous réévalué régulièrement la règle de répartition ?

Connaissez-vous votre régime matrimonial ou de PACS ? Avez-vous lu et compris votre contrat de PACS avant de le signer ?

Combien dépensez-vous chaque mois pour le logement, les emprunts, les impôts, les assurances, les vacances… 

Avez-vous un compte commun ? Des comptes séparés ?

Toutes ces questions sont bien pénibles, car amour et vision claire de la vie matérielle ne font pas souvent bon ménage.

Le sociologue Jean-Claude Kaufmann a relevé que “Les relations de couple ont cette particularité que l’essentiel est caché, et doit le rester pour les principaux intéressés.” (“La Trame du couple”, 1992) ce qui a pour conséquence que “Le silence est le meilleur moyen trouvé par les conjoints pour préserver leur bonne entente (Hahn, 1991)”.

Généralement donc, sauf pour les fanatiques de tableurs xls ou autres outils de comptabilité ménagère, la vie quotidienne conjugale et familiale ne permet pas d’être au clair avec la manière de gérer l’argent.

Moralement ce n’est pas évident. Parler d’argent, c’est mettre au jour le rapport de force, et risquer de créer des conflits. Le plus vulnérable peut rarement se permettre de revendiquer un “plan de financement juste et protecteur” de la part de l’autre. S’installe une complémentarité implicite, pas toujours confortable, qui est rarement le fruit d’un accord explicite et réfléchi. 

Parler finances ce n’est pas glamour. La vision moderne occidentale du couple enjoint aux partenaires ou époux de demeurer désirables, romantiques, d’avoir une sexualité active, ce qui, dans notre mentalité, exclut de tenir trop de discussions matérielles. Avec l’amour, nous devons avoir confiance, qui est le socle du désir, pense-t-on.

Enfin, parler d'argent dans le couple, c’est dangereux : que se passe-t-il si la discussion sur l’argent et le patrimoine tourne court ou mal ? Doit-on demeurer avec son amertume, lutter, renoncer, revendiquer, partir… C’est prendre le risque d’une séparation qui pourrait contrevenir aux sentiments des conjoints et aux intérêts de la famille.

A cela s’ajoute que, pour les personnes mariées, le régime matrimonial “par défaut” est celui de la communauté réduite aux acquêts qui se met en place… lorsque l’on ne signe pas de contrat de mariage. Un contrat implicite en somme ! Cela conduit les époux à s’engouffrer dans la vie conjugale sans avoir pris connaissance des termes de leur contrat, en méconnaissance du fonctionnement pécuniaire et patrimonial de la vie conjugale, pour la grande majorité d’entre eux.

Or, il y aurait pas mal de sujets sur lesquels s’informer, discuter et s’accorder : la répartition des dépenses courantes (les courses, les factures, le loyer, les vacances, les frais des enfants…), le financement des achats plus importants (meubles, biens immobiliers tels que résidence principale, résidence secondaire, biens locatifs), le remboursement des emprunts et le paiement des impôts, la constitution d’une épargne (comptes bancaires, assurances vies, épargne retraite…), le fonctionnement des comptes bancaires (comptes séparés et/ou joints), l’emploi des fonds et biens reçus par donation ou héritage, l’usage de biens personnels au profit du couple ou de la famille. Et bien sûr : la constitution d’un capital pour traverser sans heurts une éventuelle séparation !

Pendant la séparation : un casse-tête chinois

Et puis un jour, la séparation se profile, et le jour d’après, la décision est prise. Cette période est particulièrement complexe à mener.

On fait le bilan du passé, on découvre la toile que la tissée jour après jour n’est pas celle que l’on se représentait, il faut se confronter à de nombreuses dépenses, et on sait que l’on va s’appauvrir.

Cela commence par la difficulté à obtenir les papiers et les informations. Où sont les bulletins, de salaires, contrats de travail, tableaux d’amortissement des emprunts et contrats de prêts, décomptes d’acquisition notariés, actes d’achats, actes de vente, factures, relevés bancaires, récepissés de dons manuels, déclarations de succession, avis d’imposition, baux locatifs, relevés de charges de copropriété, synthèses des comptes et placements, le relevé de carrière et les droits à retraite...

Ensuite on découvre l’analyse de la situation patrimoniale élaborée par son avocat, un notaire, l'avocat du conjoint ou du partenaire, en fonction du régime patrimonial de l’union et des pièces que l’on aura pu réunir et lui transmettre. Il y a souvent bien des désagréments à découvrir que l’on pensait détenir 50% d’un bien alors qu’en réalité, l’autre a investi des fonds lui permettant de demander un recalcul des droits… D’autres contrariétés à entendre que ce qui l’on croyait avoir été donné par amour, est repris à la désunion. 

Les auto-reproches commencent à pleuvoir : “j’ai été bête”, “je n’aurais pas dû accepter”, “si j’avais su”... 

Et puis il faut financer la période transitoire, celle où l’un doit partir, et il arrive qu’il faille payer à la fois un loyer et un emprunt, le déménagement, plus des frais de procédure (avocats, notaire, experts), sans compter les séances chez le psy pour soi et les enfants… Il arrive qu’un des membres du couple doive attendre plusieurs années avant de récupérer sa part d’un appartement ou d’une maison où l’autre demeure, sur autorisation judiciaire, le temps d’une interminable procédure.

Matériellement l’équation est complexe, et moralement aussi : l’on découvre celui que l’on croyait connaître sous un jour nouveau. tel partenaire qui se disait démuni a en réalité réussi à se constituer une épargne non négligeable (il avait oublié de vous le dire !), tel autre vous a incité(e) à rembourser tel emprunt plutôt que de cotiser pour votre retraite en vous disant “ce bien immobilier ce sera notre retraite chéri(e) !”, on le/la  découvre calculateur/trice, radin, vénal(e)... et la détresse liée à la séparation s’intensifie.

Car la période de la séparation n’est pas celle où les personnes sont le mieux à même de prendre des décisions rationnelles… sauf si elles sont accompagnées non seulement techniquement sur le calcul de leurs droits et les décisions à prendre, mais aussi personnellement et émotionnellement par un médiateur, un coach, un psy.

Après la séparation : rééquilibrer la balance

Attention : rééquilibrer la balance ne veut pas dire partager par moitié. Le sentiment de justesse (chacun est en possession de ce qui lui revient selon l’équation singulière de la famille) devrait prévaloir sur  celui de justice (en occident la justice c’est “oeil pour oeil dent pour dent”).

Gardez à l’esprit qu’en matière familiale, tout se tient : les sentiments, les enfants, et l’argent.

S’agissant des sentiments : sentiment de trahison, d’injustice, détresse, envie, sentiment d’abandon, de pauvreté, de faiblesse, de dépendance… peuvent surgir à l’examen de la citation pécuniaire et patrimoniale et engendrer des demandes financières. Par exemple : “Mon ex femme refait sa vie, ne me demandez pas de lui financer sa nouvelle idylle avec une pension alimentaire et la moitié de la maison que j’ai financée avec mon salaire !” Ou encore : “Si j’avais compté pour mon mari, il ne serait pas si pingre dans sa proposition de prestation compensatoire : vu ce qu’il propose, c’est comme si je n’avais jamais existé !” Ou enfin : “Hors de question qu’il garde la maison, alors que moi je serai dans un petit appart, je ne partirai pas même si elle est à lui !”.

S’agissant des enfants : la prise en charge de leurs frais et le montant des pensions alimentaires dépendra des solutions financières adoptées entre les parents, de l’organisation de la résidence des enfants, des revenus et charges de chacun… Sachant que les mesures concernant les enfants ne sont jamais définitives mais ont vocation à évoluer si les circonstances changent (revenus des parents, coût des enfants). Très important : si le montant de la pension alimentaire dépend notamment du mode de garde, attention à ne pas inverser ce principe : le mode de garde ne devrait pas être négocié pour obtenir ou éviter une pension !

Dans le traitement des questions financières liées à la séparation et au divorce, il sera donc très important de démêler les fils émotionnels, parentaux, culturels, matériels, car ils s’influencent mutuellement et peuvent rendre complexe une équation censée être simple.

L’important ne sera pas que chacun reçoive “ses droits”, mais que la solution globale réponde aux besoins de la famille et permette un avenir stable. N’ayez pas peur de “vous faire avoir” ou de “faire des concessions” : si la négociation est bien menée, et que les équilibres de tous ordres sont recherchés, la vie future sera bien plus agréable.

© Anne Marion de Cayeux et l’Ecole des Conflits




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